Cette approche relativement récente du réensauvagement cherche en quelque sorte à revenir en arrière. Elle vise à redonner à des espaces aménagés leur aspect d'origine, quand les plantes indigènes s'épanouissaient dans des prés ensoleillés et des forêts denses, et le long du cours sinueux des rivières ou des ruisseaux ombragés. Grâce à la grande biodiversité de la flore, les variétés d'insectes, d'oiseaux et d'animaux étaient florissantes. Cela n'a rien à voir avec la situation actuelle, où la liste des espèces végétales et animales menacées ne cesse de s'allonger.
Réensauvager mon jardin, en milieu urbain, présente certains défis. Si je désire toujours aménager un espace remarquable, je sens que mon jardin doit contribuer à améliorer les conditions de notre planète. Mais ça me va. Parfois, il faut remettre en question nos façons de faire. Les changements climatiques et la pandémie mondiale auxquels nous sommes confrontés devraient nous inciter à repartir sur d'autres bases.
Après plus de 30 années de jardinage, ma façon de voir les choses change. Je ne tiens plus à aménager des plates-bandes de fleurs spectaculaires, à garnir mon jardin de plantes exotiques ou à avoir une pelouse parfaite. J'ai mis fin à la guerre aux mauvaises herbes. Il y a quelques années, j'ai donné mon taille-bordures et ma tondeuse ne sert qu'occasionnellement. Lentement, je me familiarise avec de nouvelles façons de jardiner qui s'écartent de la norme et, je dois l'avouer, qui me font sortir de ma zone de confort.
Il m'arrive de me poser certaines questions à ce sujet. Par exemple, jusqu'où faut-il aller quand on souhaite réensauvager son environnement? Avant la construction de ma demeure, dans les années 1960, le terrain où elle se situe faisait partie d'une ferme, où les vaches broutaient et où poussaient différentes cultures. Et avant, il faisait partie d'un territoire algonquin non cédé où ce peuple de chasseurs-cueilleurs et pêcheurs se nourrissait de poissons, de chevreuils, d'orignaux et de plantes comestibles. Et bien avant encore, on dit que des castors géants et des mastodontes occupaient ces terres.
Tout bien considéré, je me suis dit que le plus simple est le mieux. Toutefois, l'aménagement d'un jardin sauvage nécessite réflexion et planification, ne serait-ce que pour choisir les plantes (indigènes et non indigènes) adaptées à la nature du sol du jardin et à son ensoleillement. Dans un but de réensauvagement, je me suis donc fixé comme objectifs à long terme d'amender le sol adéquatement, de récupérer l'eau de pluie, d'attirer davantage d'oiseaux, d'abeilles et de pollinisateurs de toutes sortes.
Jardin pour pollinisateurs devant la maison de l'auteure